La discussion que nous avons autour
de ce schéma de massif,
est un exercice intéressant de prospective. Nous devons
partager un bilan,
faire un certain nombre de constats avant de pouvoir se projeter dans
l’avenir.
Il s’agit en
réalité d’un schéma de
développement du versant
nord du massif et non pas des Pyrénées dans leur
ensemble. C'est une des
curiosités paradoxale de ce document qui lui donne un petit
côté
« rétro ».
C'était certes la commande mais il faudra pour la suite
penser à ne plus se
limiter au seul territoire français. Il s’agit de
faire sauter les verrous
institutionnels pour ouvrir plus largement un dialogue à la
mesure de l'espace
pyrénéen.
La dernière partie du
document qui nous est présenté évoque
largement la nécessité de ce dialogue avec ceux
qui partagent avec nous
l'espace pyrénéen. Que ce soit dans les domaines
de la valorisation et de la
protection de cet espace, dans le domaine des transports ou encore pour
tout ce
qui concerne le changement climatique, nous n'échapperons
pas à un dialogue
approfondi avec les
catalans, les
aragonais, les navarrais, les basques et les andorrans. Et cette diversité est
une des spécificités du massif des
Pyrénées. Des géologues
pourraient
d’ailleurs nous rétorquer qu’il vaudrait
mieux parler de
« chaîne »
des Pyrénées pour refléter la richesse
de la diversité de ces montagnes et
l’obligation de faire avancer ensemble chaque maillon de
cette chaîne.
Nous sommes quelques-uns à
rêver d'une
vision des Pyrénées,
globale, européenne et finalement conforme à
l'histoire de ces montagnes. La
montagne des « ports »,
c’est-à-dire des lieux de passage,
d’échange
comme les appelaient déjà les arabes et les
berbères lorsqu’ils étaient aux
portes de Toulouse et à Saragosse, il y a un peu plus de
mille ans.
Le dialogue nord/sud est rendu
difficile par le déséquilibre
entre les pouvoirs des communautés autonomes du sud et nos
compétences encore
trop maigres en tant que régions. Quelques
éléments des débats nous laissent
penser que les compétences de nos régions
pourraient évoluer et c'est tant mieux,
même si avec ces évolutions, l’enjeu
pour les Pyrénées sera de garder le
contact avec les métropoles, et ne pas
désolidariser le rural et l’urbain.
Ce schéma prend donc en
compte des éléments clé de
l’avenir
et parmi eux le changement
climatique qui aura des conséquences importantes.
C'est un sujet qui a donné lieu à des
débats au Comité de Massif. On a vu
s'opposer deux conceptions différentes : il existe
une génération qui ne
semble pas croire à ce qui est annoncé par les
climatologues.
La sagesse semble toutefois l'avoir
emporté et le schéma qui
nous est présenté prend en compte
sérieusement le changement climatique. On
peut malgré tout lire, entre certaines lignes, des espoirs
d'échapper au
changement climatique. Certains semblent encore s'accrocher
à une vision d'un
développement touristique qui oublierait que la neige se
fera de plus en plus
rare et que l'eau devra être gérée
d'une façon nouvelle.
La tentation de considérer
que le ski serait l'activité
économique structurante du futur pour toutes les
vallées existe. L’étude
commandée à Atout France sur
l’adaptation de l’économie touristique
face au
changement climatique montre que l’avenir obligera une diversification des
activités, tout au long de l’année.
Si le ski sera encore présent dans les prochaines
années, les potentiels de développement
touristiques existent dans des secteurs
insuffisamment valorisés aujourd’hui : le
tourisme nature, culture,
patrimonial qui peuvent être attractifs et
complémentaires à l’existant.
Nous devrons être toutefois
novateurs dans le domaine
des
transports. Il faut moderniser la ligne ferroviaire du
piémont pyrénéen Bayonne-Toulouse,
ce train du quotidien pour de nombreux habitants et ne pas le mettre en
concurrence avec un Toulouse-Paris ou un Toulouse-Barcelona. Bilbao et
Zaragoza
sont aussi des métropoles derrière la ligne
Bayonne-Toulouse.
Nous ne devons pas oublier les deux lignes ferrées
qui
traversent aussi la partie centrale de la chaine :
des liaisons modernes
transfrontalières doivent être mises en place
entre Toulouse/La tour de Carol/Barcelone
d’une part et Pau/Canfranc/Saragosse d’autre part.
Aussi,
l'avenir ne se fera qu'avec les femmes et les hommes
qui vivent dans les Pyrénées, des agriculteurs,
des bergers mais aussi de
nouveaux habitants qui développeront d’autres
activités, qui utiliseront les
technologies leur permettant de rester connectés avec le
reste du monde.
Nous avons regretté
qu’un objectif clairement fléché vers
le
développement
de l’agriculture biologique de montagne (agriculture,
pastoralisme
…) n’ai pas été inscrit dans
ce schéma interrégional
d’aménagement et de
développement du massif des Pyrénées.
En conclusion, il faudra donc penser
à travailler
sur un futur schéma du vrai espace
pyrénéen, pas celui-ci
découpé artificiellement par des
frontières
administratives. Les Pyrénées, à
l’instar de l’Europe, sont unies dans la
diversité. Il nous faudra penser aussi à revoir
les outils de coopération
existants : CTP, GECT, mais aussi clarifier
« l’archipel » des
structures du réseau Pyrénées (CPT,
APEM, ADEPFO, CIDAP, etc.).
Nous voterons ce schéma
parce que nous pensons qu'il amorce
un virage qui devra être négocié par la
génération qui vient et qu'elle saura
le faire. En attendant nous serons attentifs à ce que les
actions correspondent
aux constats.