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Charte européenne : la bataille qu’il faut gagner

31 juillet 2015

Le conseil des ministres a examiné ce matin le projet de loi portant ratification de la Charte Européenne des Langues Régionales ou Minoritaires du Conseil de l’Europe

Dans son communiqué la ministre de la Justice, Garde des Sceaux explique :

« Le projet de loi ajoute un article 53-3 à la Constitution qui permet la ratification de la Charte

européenne des langues régionales ou minoritaires. Il tire ainsi les conséquences de la

décision n° 99-412 DC du 15 juin 1999 par laquelle le Conseil constitutionnel a jugé que la

Charte comportait des clauses contraires à la Constitution et que sa ratification ne pouvait

intervenir qu’après révision de la Constitution» .

Ce sera donc le texte qui a déjà été adopté par les députés en janvier 2014 qui servira de texte pour le projet gouvernemental. Les députés s’étaient prononcés a plus de 70% sur cet article 53-3 qui serait ajouté à la constitution. Il ne reste plus qu’à le faire approuver par le Sénat et ensuite de le présenter aux parlement réuni en Congrès. Cela ne se fera peut-être qu’au printemps prochain mais il n’en reste pas moins que la bataille va se livrer dans les derniers mois de 2015. C’est dans cette période qu’il faut arriver à convaincre un maximum de parlementaires, sénateurs et députés, afin que le texte recueille l’approbation des 3/5 des membres du Congrès.

Chaque fois que cette question est entrée dans l’actualité elle a été traitée par les médias qu’ils soient parisiens ou régionaux. Et depuis 1999 la Charte a été souvent évoquée.

A chaque fois il y a eu des caricatures et des attaques infondées sur ce texte, qui d’ailleurs n’étaient que des attaques camouflées contre les mouvements et association de promotion des langues de France. Les insinuations selon lesquelles nous serions, consciemment ou inconsciemment, des ennemis de la République n’ont pas manqué. On les entend à nouveau et on les entendra dans les semaines qui viennent.

Mais la République et ses principes ne sont pas la propriété de tel ou tel et il n’existe pas à ma connaissance de comité chargé de donner des diplômes de républicanisme.

Nous sommes donc des citoyens de la République et nous devons nous faire entendre. Parce que nous faisons nôtres les principes de liberté, d’égalité, et de fraternité et que nous disons que nous pouvons les exprimer aussi dans nôtre langue. Si je dis libertat, egalitat, fraternitat, je me sens tout aussi citoyen de la République que qui que ce soit.

Nous disons aussi que la République ne peut être bâtie sur l’uniformisation linguistique et culturelle. La République doit s’entendre comme un lieu de respect de la diversité.

C’est pour cela que ratifier la Charte européenne des Langues Régionales ou Minoritaires est le minimum que la France doit faire afin de se mettre en conformité avec ses propres principes fondateur et avec son discours sur la scène internationale, là où elle ne manque pas de rappeler son attachement à la diversité culturelle et là où elle invoque l’exception culturelle.

Lorsque j’entends le président du Sénat expliquer que « ce n’est pas le moment » de ratifier cette Charte parce que c’est le moment de « rassembler », évoquant tour à tour la crise économique et les tensions nées des attentats du début de l’année, je m’insurge ; pire je me sens insulté en tant que citoyen que l’on puisse faire le lien entre nos revendications de citoyens et des événements qui sont sans rapport, injustifiables et intolérables. Mis à part une volonté de coller à un certain discours extrême et populiste je ne vois pas l’intérêt de ces amalgames.

Quant à ce qui peut se dire à gauche c’est de la même eau. L’article publié dans le Canard Enchaîné était à cet égard bien pitoyable : un ramassis de fausses informations, de rumeurs et une lecture volontairement biaisée de la Charte.

Nous devons nous mobiliser pour faire ratifier cette Charte et provoquer un vrai débat sur la question des langues. Les dangers pour la République n’existent pas, les risques de voir le conseil municipal de telle ou telle petite commune, obligé de traduire en 75 langues ses décisions est une farce ridicule.

Les responsables politiques qui osent porter ce type d’arguments devant l’opinion se déconsidèrent et jettent le doute sur la sincérité de tout le reste de leur discours, sur tout ce qu’ils peuvent dire à propos d’autres questions.

Il faut aussi lister les autres arguments qui semblent être du bon-sens mais qui en réalité cachent une méconnaissance des questions linguistiques. On entend que l’on « ferait mieux d’enseigner les langues étrangères » parce que « ce serait plus utile ». Tel parlementaire dit qu’il préfère « que sa petite-fille apprenne le chinois plutôt que l’occitan », l’occitan qu’il dit d’ailleurs connaitre lui-même. Comme si d’apprendre une langue empêchait d’en apprendre une autre ? Nous savons que c’est le contraire.

Nous vivons dans un pays dont la culture sur la question des langues est déficitaire. On ne pourrait apprendre une autre langue avant de savoir parfaitement le français. Donc à quel âge pourrait-on commencer à apprendre une seconde langue ? Et que faut-il penser des enfants bilingues ? Voilà ce que nous avons à combattre : l’ignorance sur ces questions qui vient parfois, et même souvent, apporter de l’eau au moulin de ceux qui sont de mauvaise foi.

Nous devons être ensemble pour aller convaincre nos députés et nos sénateurs. Et comme il se trouve que les députés et les sénateurs occitans sont très nombreux, nous avons, nous les occitanistes, une responsabilité très grande.

David Grosclaude

31/7/2015

Pour mémoire voici le texte qui a été adopté par l’Assemblée Nationale le 28 janvier 2014.

Art. 53-3.

La République peut ratifier la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires adoptée à Strasbourg le 5 novembre 1992, signée le 7 mai 1999, complétée par la déclaration interprétative exposant que :

« 1. L’emploi du terme de groupes” de locuteurs dans la partie II de la

Charte ne conférant pas de droits collectifs pour les locuteurs des langues régionales ou minoritaires, le Gouvernement de la République interprète la Charte dans un sens compatible avec la Constitution, qui assure l’égalité de tous les citoyens sans distinction d’origine, de race ou de religion ;

« 2. Le d du 1 de l’article 7 et les articles 9 et 10 de la Charte posent un principe général n’allant pas à l’encontre de l’article 2 de la Constitution, en application duquel l’usage du français s’impose aux personnes morales de droit public et aux personnes de droit privé dans l’exercice d’une mission de service public, ainsi qu’aux usagers dans leurs relations avec les administrations et services publics. »

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